Le confort moderne ? Derrière cet étrange nom désignant un groupe d'anciens hangars agricoles, se trouve le nouveau centre multiculturel de Poitiers (86) qui réunit physiquement et administrativement une galerie d'art, une salle de concert, un club, un bar et des locaux associatifs, après trente ans de fonctionnement séparé. Une réhabilitation et extension signée par Nicole Condorcet dont le seul précepte est le respect du passé.

Le 20 mai 1985, rue du Faubourg du Pont Neuf à Poitiers, ce qui fut une ancienne usine d'engins agricoles puis des entrepôts d'appareils électroménagers nommés Confort.2000, s'ouvrait au public. Le résultat : 8 500 mètres carrés repartis en quatre édifices hébergeant une galerie d'art, une salle de concert, et des locaux associatifs mis à disposition des habitants, dédiés à l'expression artistique et musicale.

Dans ce quartier à la fois périphérique et industriel, situé à l'est du centre-ville, le projet avait dès sa création entraîné « une levée de bouclier », comme le livre Alain Claeys, Maire actuel de Poitiers. En effet, à l'époque, personne n'imaginait que ce type d'équipement puisse avoir sa place dans une zone pavillonnaire et dans un lieu si éloigné de la typologie habituelle des institutions muséales et aussi peu adapté aux usages, composé de bâtiments mitoyens aux plafonds bien trop bas qui ne communiquent pas entre eux, sans parvis commun à proprement parlé et avec des circulations peu fluides. Cependant, année après année, le Confort Moderne est devenu un lieu de réunion approprié par la population locale et un emblème culturel pour la ville. « Il y a un préalable, rajoute Nicole Condorcet. L'usage des mots n'est pas gratuit. »

En septembre 2017, après seize mois de travaux, l'établissement, devenu vétuste et toujours plus impropres à ses usages, fait peau neuve, sous la houlette de Nicole Concordet, ayant notamment fondé l'agence Construire avec Patrick Bouchain et Loïc Julienne en 1998. La réhabilitation des quatre anciennes halles industrielles, prenant place sur une vaste parcelle rectangulaire, se veut la plus respectueuse et la plus simple possible, selon la recette qui a fait le succès de l'architecte – seul l' « abattoir » placé à l'ouest du site en état de délabrement avancé a été détruit et remplacé par une cour technique. « Le lieu était arrivé à la limite de ses possibilités. Il fallait le faire basculer vers le futur », précise la conceptrice. Mais « il fallait respecter 30 années d'expression et de travail préalables ».
Pour cela, le maître d'œuvre a décidé de garder l'emplacement et la fonction d'origine des édifices de plain-pied, mais en les ouvrant les uns aux autres, limitant les interventions au minimum.
L'entrée, un simple passage entre deux maisons d'une rue résidentielle, n'a pas changée. Le duo d'artistes allemands Lang & Baumann y a simplement peint sur la façade d'une d'entre elles une fresque psychédélique aux couleurs pop, apportant une dimension totémique à la modeste demeure mais surtout un repère visuel pour les curieux qui chercheraient l'accès de ce discret ensemble enclavé.

Depuis la cour principale, point d'orgue physique et symbolique, se trouve l'entrepôt principal hébergeant la galerie d'art de 1 100 mètres carrés. Juxtaposé perpendiculairement à lui,un second hangar logeant la réception, un bar et un club de musique de 250 places ; tandis qu'en face est disposée une troisième halle, qui accueille pour sa part une salle de concert d'une capacité de 800 personnes.

Afin de compléter la riche offre culturelle du site, deux bâtiments en bois de deux niveaux, ont été rajoutés : à l'ouest 12 résidences d'artistes et trois studios d'enregistrement, et à l'est, des bureaux, une cuisine et la Fanzinothèque – collection de fanzines et de petites éditions. L'ensemble des toits a ensuite été rehaussé de 2 à 5 mètres, pour des espaces plus généreux et plus adaptés aux pratiques. Le tout harmonisé sous une couverture en zinc noir. De part et d'autre du hangar fondateur, le parvis et la cour technique – située entre les logements et la halle d'origine –, sont quant à eux abrités par une toiture dentelée en polycarbonate translucide qui crée un lien physique entre les parties d'un tout enfin unifié.

Soucieuse de préserver l'identité industrielle de l'ancienne friche et fidèle à sa démarche de réemploi des matériaux, Nicole Condorcet a fait le choix de conserver le maximum d'éléments architecturaux existants. Les anciennes structures métalliques supportant les sheds, alors débarrés de leurs vielles tôles ondulées servent, par exemple, aujourd'hui de supports scéniques pour les spectacles et les expositions, tout en témoignant de l'histoire du lieu. La cabane de chantier, où se déroulaient les réunions quotidiennes des artisans, étudiants bénévoles et des maîtres d'ouvrage, a quant à elle été élaborée à partir de matériaux trouvés sur le site. Une démarche, mêlée à la promesse d'un chantier court, qui a séduit le maître d'ouvrage : la Ville.

Un projet inscrit autant dans une volonté de réappropriation et de sauvegarde du patrimoine architectural de Poitiers, que dans un processus social et culturel de la Commune, qui manque cependantd'un parti pris urbain fort. Mais c'est peut-être finalement ici qu'en réside toute sa richesse.

Pour en savoir plus, visitez le site de Nicole Concordet

Photographies : Pierre Antoine; Lang & Baumann et Nicole Concordet

 



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