Cette année, le Festival des Architectures Vives de Montpellier (34) présentait douze installations artistiques et un pavillon réalisé par le studio local ØNA Architecture. Avec ses 16 000 visiteurs, l'évènement mêlant architecture et patrimoine vernaculaire permet au grand public de découvrir les travaux de jeunes artistes prometteurs. Retour sur cet événement, dont les réalisations abordent de manière poétique le thème des émotions.



Pavillon du FAV 2017 : Émotion Verticale, ØNA Architecture

Point de départ du festival, le pavillon d'accueil et d'information est essentiel au bon déroulement de l'évènement. Placé au cœur de la cours de la CCI de Montpellier, en plein centre-ville, il présente en outre une rétrospectives des travaux les plus marquants du FAV. C'est également ici que le public se réunit pour élire la meilleure installation du festival.
Cette année, cette lourde tâche a été confiée aux Montpelliérains de l'agence ØNA Architecture qui réalisent Émotion Verticale, une structure composée d'une multitude de poteaux blancs en acier de hauteurs diverses, rappelant les célèbres colonnes de Buren. À travers cet ouvrage, les concepteurs ont voulu réinterpréter les pilastres en pierre de la CCI datant de 1704.



Prix du Jury : Paper Cloud, Studio 3A
Le Studio 3A est le fruit de la rencontre hétéroclite de trois pays aux antipodes les uns des autres : le Japon, l'Allemagne et le Mexique. Cette mixité se ressent dans ses travaux, dont le but est de comprendre les différents contextes et cultures dans lesquels ils s'inscrivent. Avec Paper Cloud, le collectif imagine une structure cubique inachevée en papier immaculé, composée d'éléments tubulaires superposés et encastrés. Laissant filtrer la lumière du jour, l'oeuvre nébuleuse contraste avec le site en pierre sur lequel elle est placée : statique et massif. Lorsque le visiteur pénètre au sein de l'œuvre, la lumière s'atténue et le laisse pensif, seul avec lui-même.



Prix du Public : Immersion, Lucia Martinez Pluchino, Raquel Duran Puente

Pour ce projet, le duo bordelais a souhaité pousser les limites de l'immersion au maximum en remplissant la cour de ballons rouges. Un procédé simple mais vecteur d'émotions : les baudruches colorées, symboles de l'enfance procurant un certain sentiment de nostalgie, filtrent la lumière et diffuse leur teinte carmin à la manière de projecteurs. Le lieu de passage dans lequel cette réalisation prend place obstrue le parcours habituel du visiteur mais lui permet de laisser libre cours à son imagination : il peut aussi bien s'agacer et frapper les balles pour passer, ou s'en amuser et retomber en enfance.



Mention spéciale : La Madeleine, Atelier Micromega

Micromega, un collectif lyonnais composé de cinq jeunes diplômés en architecture, conçoit des ouvrages créatifs, ludiques et engagés. Cette fraîcheur se retrouve dans La Madeleine, dont le nom n'est pas sans évoquer la madeleine de Proust et donc, le rapport à l'enfance. Cet ouvrage évolutif se matérialise par de grands blocs de construction colorés que le passant est invité à imbriquer les uns dans les autres au gré de ses envies pour créer sa cabane, comme lorsqu'il était petit.



À travers, Concentrico 03

Réalisée par le collectif espagnol Concentrico 03, ce travail s'établie au cœur de la cour d'un hôtel particulier de Montpellier isolant l'œuvre de l'effervescence de la ville. La présence d'un puits central inspire au studio À travers, une structure labyrinthique en bois aux parois courbes. Plusieurs chemins mènent à la cavité, vestige d'un autre temps et permettent au spectateur de prendre le temps de flâner pour appréhender différemment l'histoire du lieu.




AAA, ODD

Issues de cultures différentes – la première est écossaise, la suivante est espagnole et australienne et la dernière, franco-belge –, les trois architectes diplômées de l'ENSAM sont rassemblées par la même sensibilité créatrice sous la bannière ODD. Placé dans la cour de l'Hôtel de Griffy, AAA intrigue par sa forme et sa couleur. Lorsque le promeneur se balade dans la cour, il se retrouve effectivement confronté à un grand mur noir comprenant une entrée qui le mène dans un corridor sinueux et sombre, peu rassurant. Le nom de l'oeuvre provient des différents stades émotifs par lesquels elle fait passer le spectateur : anticipation, appréhension et angoisse.




El Dorado, Collectif Pourquoi Pas ?!

Pour cette structure, le collectif lyonnais Pourquoi Pas ?! s'inspire des mythes, épopées et chasses au trésor présents dans l'imaginaire collectif comme la quête de Perceval ou celle de Sir Walter Raleigh en Guyane. En partant des schémas narratifs, les concepteurs d'El Dorado traduisent de façon architecturale les différentes phases émotives par lesquelles passe le protagoniste : le doute, la résignation, la joie – lorsque s'achève la quête –, à travers une œuvre verticale, faite de tiges en acier posées sur un socle en cuivre agrémenté d'écrous que le spectateur est invité à faire glisser sur les baguettes. L'ouvrage s'accompagne d'un dispositif sonore hypnotique, plongeant le visiteur dans une atmosphère unique, presque mystique.



Forme Sauvage, Lilit Sarkisian

Avec ce projet, l'architecte russe issue du collectif parisien Silteplait, Lilit Sarkisian, fait jouer l'imagination des spectateurs, leur laissant le libre choix d'interpréter les formes en plastique rose translucide assoupli par une thermo-formation qui composent Forme Sauvage. Surmontées d'un diffuseur de brume parfumée, l'ensemble déforme l'espace dans lequel il est positionné. Si l'on lève la tête, l'architecture apparaît comme distordue lorsqu'on la regarde à travers les éléments transparents tandis que si l'on baisse les yeux, des ombres colorées dansent au sol. Tous les sens sont mis à l'épreuve et le flâneur se retrouve happé dans un univers irréel, comme dans un rêve.




I Love Montpellier, PistachOffice

L'oeuvre imaginée par le collectif néerlandais PistachOffice se base autour d'une unique émotion, un seul sentiment : l'amour. Pour cela, il a pris le parti de faire de Montpellier, le temps de l'événement, la capitale de la passion, de la tendresse, de l'échange, du désir... I Love Montpellier est un banc circulaire carmin dont l'ergonomie est inspirée des positions du baiser, de la séduction ou de la trahison. La partie vide que dessine sa forme est remplie de ballons en forme de cœur rouge, à la fois kitch et symbole universel de ce sentiment régissant nos vies.




Tomber dans le ciel, École d'Architecture de Saint-Sébastien (Espagne)

Tomber dans le ciel est un ensemble imaginé par les étudiants de 5e année de l'École d'Architecture de Saint-Sébastien, questionnant les limites de l'espace privé à travers la sensation de vertige. Pour accéder à la cour de l'Hôtel des Trésoriers de la Bourse où la composition est positionnée, le visiteur doit passer par une porte rouge placée dans une structure en bois. Une fois passé ce seuil, il se retrouve sur le point de tomber... dans le ciel. En effet, au sol, une mosaïque de miroirs carrés reflète et déforme les cieux, comme une brèche nous plongeant dans un univers parallèle. Ces éléments réfléchissant agrandissent également, par jeu d'optique, l'espace étroit du patio, accentuant ainsi l'aspect vide de la parcelle.




Souvenir Particulier, Collectif Commun

Le thème de l'émotion évoque au Collectif Commun l'enfance et la nostalgie, qu'il retraduit par une structure courbe immaculée à travers laquelle, par de petits trous, le spectateur peut observer des éléments de sa jeunesse. Ces volumes internes sont des interprétations en trois dimensions de dessins puérils, que nous avons tous exécuté un jour où l'autre. En les dissimulant au sein de la structure massive, les concepteurs poussent le visiteur à se baisser, à prendre la taille qu'il avait lorsqu'il était petit et, enfin, à prendre du recul sur le bambin qu'il était autrefois.




The Curtain, Maria Anton Barco, Maria Salan et Maria Ramos

Imaginé par Maria Salan et Maria Ramos, membres talentueuses du programme Interior Design à ESNE Madrid, et par la directrice de cette plateforme, Maria Anton Barco, The Curtain est un rideau positionné à l'entrée d'une cour, floutant les frontières entre paysage réel et artificiel. Cette cascade de feuilles automnales taillées dans du plexiglas laisse transparaître les différentes nuances du jour produisant ainsi des ombres plus que vraisemblables au sol, à la manière d'un site bucolique. Placée au milieu d'une réalisation architecturale pérenne, elle apporte un peu de nature au sein de un espace minéral et procure aux promeneurs un sentiment de calme et de satisfaction apporté par un cadre pittoresque en plein automne.




TR-24, Ben-Dao

Le parcours se termine par un agencement sobre et minimaliste, uniquement composé de tourniquets aux portes opaques. Ici, rien n'est imposé : le flâneur se déplace à sa guise. Pour TR-24, le collectif parisien Ben-Dao questionne la nature même d'une cour, c'est-à-dire un lieu de passage, et pousse cette fonction à son paroxysme. La répétition de ce module circulaire simple permet au passager de se rendre compte du chemin qu'il effectue et de prendre une certaine distance avec le chemin qu'il parcourt habituellement sans s'en rendre compte.

Pour en savoir plus, visitez le site du FAV

Photographies : Photo Architecture



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