Sans faire l’impasse sur les dimensions fonctionnelles de l’architecture, le projet de Tolbiac tente d’emmener le logement vers les formes multiples de l’habiter, en explorant l’expressivité des matériaux, le potentiel des espaces communs, les ouvertures du paysage et l’agencement des typologies. En somme, le rapport au lieu et à son histoire.

Longtemps, le croisement de la rue du Tolbiac et de la rue du Chevaleret annonçait un changement de paysage dans l’espace parisien, le passage d’un faubourg dense à un univers de voies ferrées, un fleuve industriel enjambé par un pont métallique.

L’aménagement du quartier Seine Rive Gauche a effacé l’ouvrage d’art et enfoui la plaine ferroviaire sous un sol artificiel, au risque de verser dans une forme de ville générique exprimant peu les spécificités du lieu. A la charnière de la ville ancienne et de la ville en formation, le projet des Étoffes de Tolbiac veut s’inscrire dans son site sans idéaliser le passé, évoquer une histoire parisienne particulière pour redonner une identité propre à une opération de logements de son temps, ouverte sur la ville tout en filtrant ses nuisances et ses stimulations les plus envahissantes.

Le site occupe une position doublement stratégique, à l’angle de deux rues séparées par un dénivelé de près de sept mètres. L’escalier reliant historiquement les deux voies borde le terrain de l’opération, formé par la réunion de deux parcelles. Des ateliers artisanaux et des entrepôts construits des années 1920 aux années 1960 sont remplacés par une opération mixte comptant 3000 m2 de commerce et 5000 m2 de logement. 

La répartition des surfaces commerciales entre les rez-de-chaussée des deux rues minimise l’impact de l’activité, qui donne un socle aux logements se déployant à partir du R+1 sur la rue du Chevaleret.

La dualité bois-béton guide la conception du projet. Les qualités mécaniques du béton, sa résistance au feu et ses capacités d’affaiblissement acoustique conduisent à l’employer en structure. Du mélèze est utilisé en revêtements sur toutes les surfaces, tandis que les structures des murs ossatures bois et les montants verticaux de la façade sont réalisés en pin Douglas. Les éléments bois visibles acquièrent par traitement autoclave une teinte sombre évoquant les façades des anciens hangars et entrepôts du Paris industriel. Les qualités tactiles du matériau autant que ses qualités visuelles sont mises en avant. 

Le bois massif a été préféré au lamellé collé pour les poteaux de la façade, avec l’intention de valoriser les qualités du matériau, développer un aspect architectonique rappelant l’origine naturelle de cet élément, en rupture avec les produits reconstitués par collage habituellement utilisés dans la construction bois. Des éléments en lamellé-collé sont mis en œuvre très ponctuellement pour la création de poutres courbes portant des espaces communs. Le métal est employé pour les garde-corps, avec une finition canon de fusil qui l’intègre à l’ensemble.

 

Visuels © : Luc Boegly

 



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